Enfance venteuse (3)

16 janvier 2013 // 21:43

 Parfois j'y pense et tu me manques, même lorsque tu perdais la tête tu me manquais pas comme ça. Alors la nuit, le soir surtout, mais la nuit aussi, j'éventre des cigarettes pour les reremplir de drogue. Je suis devenu adroit à ça, tu sais, rouler, rouler. Puis le papier qui crame, j'aime le bruit. Et au milieu des hallucinations qui s'en suivent, je sais que tu serais déçue de ça, alors j'ai honte. Mais faut que tu comprennes que c'est pas tout à fait ma faute, enfin, je veux dire, j'aurais voulu autre chose. On veut tous autre chose. J'aurais voulu un meilleur ami qui soit pas juste capable de pomper ma bonne humeur et m'abreuver de ses pensées noires quand lui va mal. J'aurais voulu que celle que j'aime ne se pose pas toutes ces questions, ne veuille pas être libre comme ça. Je crois pas que j'ai mérité ça mémé, je crois pas. Tu sais, je suis gentil comme tu m'as fait. Et t'écrire est ridicule car on y croit pas, en dieu, au paradis et toutes ces choses. Alors la musique est toujours la même et je tourne en rond en regardant que tout s'effrite comme ça, que tu me manques et que tu seras jamais fière de moi comme j'aurais voulu que tu le sois.
Ce matin, il faisait froid et soleil et du vent, comme le jour où l'on t'a mise en terre. J'ai pensé ça au réveil, et ça m'a tué. Je voulais pas sortir du lit, je voulais pas savoir ça. Mais il faut agir. Maman m'a raconté l'histoire de Dany, j'en ai pleuré pendant longtemps, je sais que t'as été plus forte que moi. Alors je passe des nuits claires obscures à fumer des joints qui me maintiennent dans cet état de constante déprime. Et je n'ai plus très envie de vivre souvent, et je pleure souvent en me demandant pourquoi t'es partie comme ça à petit feu. Pourquoi tes idées sont parties, pourquoi tu me prenais pour ton frère, puis pour plus personne. Et toutes ces nuits où je dors comme une enclume c'est pour te voir mourir c'est pour voir la vie une dernière fois dans tes yeux quand tu as touché ma joue, que tu m'as dit que tu allais te reposer un moment après peut-être trois mois de silence. Je veux pas me plaindre, j'ai juste rien fait pour ça, rien fait pour avoir mal comme ça au fond du coeur, pour plus sentir la vie de la même façon. Peut-être que tu me vois, là haut, tout là haut, moi je t'y vois bien, avec tes mots et ton amour. Ma tête bouge et sonne creuse, il fait froid toujours en janvier, un peu comme lorsqu'on te met en terre et j'ai toutes ces images que je ne veux pas supporter, mais c'est ça la douleur. C'est ça les mots que l'on se dit de travers. Je voudrais que tu sois là pour me dire que la vie est belle parce que je veux l'entendre de personne d'autre que de toi et tes yeux qui transpercent. Allez quoi, tu veux pas revenir ? Ce sera bien, on ira boire des orangina à la samaritaine. On ira où tu veux, mais j'arrêterai de dévier de moi-même comme ça. Je soufflerai fort sur mes doigts pour que la flamme y revienne. Pour avoir le coeur qui fait tous ces hymnes. Allez reviens, on ira rire, on ira pleurer, on ira être en vie. Moi je veux être en vie manger des pâtes à m'en casser le ventre, boire de la menthe à l'eau, écouter ton pas qui traine, te savoir belle, te savoir belle tout le temps. Je veux te voir dans ta cuisine je veux te voir faire la gymnastique dans le canapé. Je veux t'entendre parler de toutes ces choses que je ne t'ai jamais demandé. Je veux arrêter de fumer pour oublier que tout s'effrite, arrêter de boire parce que de toute façon je n'ai plus soif. Je veux arrêter de voir tous ces gens vieillir. Je veux pleurer dans tes bras, parce que avec toi, tes bras, tout va, pour la vie et celle qui suit encore. 

Tant pis pour l'impossible. Les photos de famille finiront terne, le regard perdu. Je zappe sans cesse abruti par la télé et les joints. Demain j'irai boire, j'aime fêter les échecs. Tu me manques et je t'aime. Promis, bientôt j'arrête, pour toi, quand tu me manqueras moins que ça.

Commentaires

Can I kick it ?

Par Si.mon.regard le 16 janvier 2013 // 23:14
C'est un refuge comme un autre, et peut-être qu'elle aurait pas aimé et peut-être qu'elle aurait compris.
La honte est malvenue pour l'aveu de la douleur.
 

Can I kick it ?









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